Mis à jour le 11 mars 2024 08H41
1. Face aux problèmes que rencontrent les usagers de l’hôpital public j'ai été amené à solliciter l'intervention de Madame la Défenseure des droits pour répondre à quatre questions.
a. Est-il normal qu'un médecin ayant en mains les comptes rendus d'actes techniques réalisés mette six semaines à vous les communiquer ?
b. Est-il normal qu'un médecin vous ayant rencontré pour la première fois, disons à T=0, après plusieurs actes techniques réalisés, doive recevoir trois demandes écrites, aimables dont la dernière en copie à son chef de service, pour vous accorder, un deuxième rendez-vous à T=2 soit deux mois après le premier ?
c. Est-il normal que ce même médecin vous annonçant à, disons, T=1, un examen à réaliser, doive recevoir plusieurs courriels pour finalement vous fixer une date de rendez-vous pour ledit acte à T=3, soit deux mois après et que cette date est à T=6 soit cinq mois après son annonce, sans justification sur les conséquences éventuelles de ce délai ?
d. Est-il normal qu' un chef de service estime que "vos récriminations et reproches multiples et variés" justifient "une rupture de confiance" pour rompre manu militari la relation, en clair pour vous envoyer promener alors même que cette notion de contrat de confiance n'est plus, depuis le 4 mars 2002 (loi Kouchner), un concept abstrait mais qu’elle s'inscrit dans le Code de Santé publique en son article L1110-3, avant-dernier alinéa et que cet article ne soutenait pas un tel acte ?
Incidemment, est-il normal que dans sa réponse à ma réclamation la Défenseure des droits écrit "l’équipe médicale a conclu de façon unanime à une absence ...." alors qu'un docteur spécialiste du CHU a écrit "Probabilité faible ...... ce jour" vu qu'une probabilité faible n'est pas une absence de risque ! Une telle phrase semblant relayer un avis médical pourrait conduire un patient lambda à abandonner le suivi de son dossier médical.
2. Dans le contexte de ma réclamation auprès de la Défenseure des droits j'ai invoqué la violation par l’hôpital de plusieurs articles du Code de santé publique et surtout le caractère infondé de la rupture de confiance, de surcroît, manu militari sans aucune discussion, par un chef de service, ce qui relève de l'abus de pouvoir. Mon analyse fut inspirée par un article passionnant de Madame Chloé Leduque "L’évolution de la relation patient-médecin : qu’en est-il du contrat médical ? Les Cahiers Louis Josserand, février 2023" (Lexbase) communiqué à la Défenseure des droits. Article inspirant qui démontre l'obsolescence de cette notion de "contrat de confiance" dans un environnement légal modifié par la Loi du 4 mars 2002 (loi Kouchner) et où le médecin qui m'accueillit me dit, tout de go, que je lui avais été "attribué" ! (Sic). Ce mot excluant, déjà, à lui seul, toute notion même de contrat.
J'ai développé une violation de plusieurs articles du code de santé publique: le L1110-1, le patient a un « droit fondamental à la protection de la santé » qui« doit être mis en œuvre par tous moyens disponibles au bénéfice de toute personne » , le L1110-2 : le patient a droit au « respect de sa dignité », le L1110-3, avant-dernier alinéa "un refus de soins (NDLR: ne peut être) fondé (NDLR: que) sur une exigence personnelle ou professionnelle essentielle et déterminante de la qualité, de la sécurité ou de l'efficacité des soins », le R-4127-2 et R-4127-7.
J'ai mentionné que je fis face à un système sans humanité, ni respect pour des légitimes inquiétudes, pour lequel le patient est un sujet qui se doit d'être passif, aux ordres alors qu'il n'y a pas de bonne médecine sans le patient qui, à mon sens, a un droit absolu à se voir expliquer, dans un délai raisonnable, oralement les résultats des actes prodigués ainsi qu'à une gestion respectueuse de son agenda sans avoir à lutter pour cela, bref à la dignité, que là seul gisait le débat, tout étant question de proportionnalité. Devoir envoyer trois courriels pour avoir une réaction deux mois après un premier rendez-vous et pouvoir, passé six semaines après le dernier acte technique, écouter son médecin commenter les résultats n'étant pas proportionnel. Encore moins le fait de laisser un patient sans fixation de rendez-vous pendant deux mois après l'annonce d'un acte ni de le voir fixer cinq mois après sans la moindre explication. En ajoutant "Combien de temps eusse je dû attendre sans mes demandes ? Est-ce, cela, une gestion raisonnable, respectueuse du patient ? ".
J'ai essayé de faire du droit, d'expliquer pourquoi en droit, l'attitude du CHU ne pouvait être admise.
3. Six mois passés après l'introduction de ma réclamation la réponse de la Défenseure des droits peut se résumer en deux de ses phrases, à savoir:
"S’agissant du service de .... la direction du CHU affirme que les délais de réponse du docteur .... et de réalisation de l’examen .... sont des délais ordinaires."
"Par ailleurs, la direction ... explique qu’en rompant le contrat de confiance qui vous liait au service ......., le docteur .... n’avait aucune obligation de justifier sa décision". (je mets en caractères gras).
La Défenseure conclut "La procédure ouverte auprès du Défenseur des droits est donc désormais achevée".
On cherchera en vain une réponse en droit à mon argumentation invoquant une violation de maints articles du Code de santé publique. Nous sommes en présence d'un travail où la Défenseure des droits s'est contentée de prendre l'avis de la direction du CHU et du service concerné (voir "la direction du CHU affirme" et "la direction ... explique") pour conclure "En conséquent, ces éléments ne mettent pas en évidence des faits susceptibles de qualifier une défaillance du service public portant atteinte à vos droits" (Je mets en caractères gras).
Le débat que je portais à l'attention de la Défenseure des droits nous concerne tous face à la situation catastrophique du secteur de santé public. Il s'agit de savoir, en droit, si face à un problème de santé les délais que j'ai vécus sont justifiés ? Est-ce que voir un médecin rester assis pendant six semaines sur des comptes rendus est en droit normal, est-ce qu'il est admissible qu'un patient doive se battre poliment, envoyer trois courriels, pour pouvoir parler à son médecin deux mois après un premier contact, est-ce qu'il est acceptable qu'un rendez-vous à un acte technique requiert deux mois pour simplement être fixé, est-ce que s'en inquiéter justifie qu'un Professeur chef de service invoque une rupture de confiance ?
Ces questions taraudent beaucoup d'usagers du service public. Le Défenseur des droits dont la mission est de défendre les personnes dont les droits ne sont pas respectés et de permettre l’égalité de tous s'est contenté de ... prendre l'avis du CHU et d'en conclure qu'il n'y avait pas de" faits susceptibles de qualifier une défaillance du service public portant atteinte à vos droits" ! (Je mets en caractère gras).
Faut-il s'étonner de ses conclusions puisqu'elles sont basées sur la seule opinion de l'institution incriminée ? Où est la réponse aux violations que je mentionne au Code de santé publique ?
Ainsi, devoir envoyer trois demandes courtoises pour parler, in fine, une deuxième fois à son médecin deux mois après la première rencontre suite des actes techniques dont il avait les résultats depuis six semaines ne pose aucun problème puisque telle est la pratique dans ce CHU ?
Ainsi, qu'il faille deux mois pour, à la suite de plusieurs demandes, voir fixer la date d'un rendez-vous, ce cinq mois après son annonce, sans explications, est normal puisque le CHU le dit ?
Ainsi, envoyer paître pour rupture de confiance un patient aimable qui s’inquiète poliment des délais sans avoir de réactions après deux mois est normal puisque "la direction du CHU ... explique que le chef de service n'avait aucune obligation de se justifier" ?
A ma question de savoir si, dans mon cas, le Défenseur des droits a fait du droit, je vous laisse répondre.
Étant en présence d'une maltraitance juridique puisque aucun de mes griefs en droit ne fut analysé, le Défenseur des droits s'étant basé sur les seuls avis de la direction du CHU pour classer sans suite ma requête, j'ai introduis un recours auprès du Tribunal administratif de Nice pour que mon dossier soit rouvert - par le Défenseur des droits - dans le cadre d'une analyse en droit équitable respectant le principe même de la fondation de l'institution du Défenseur des droits.
En effet, son traitement ne peut être admis non seulement parce qu'il y a, en l’occurrence, un déni de justice mais parce que je note que dans la Décision du 26 février 2021 du Défenseur des droits n°2021-030, il prend une position de justice analysant la plainte quant au fonctionnement du service public, la réponse du préfet (relevant également du satisfecit) et qu'il effectue une analyse en droit ne se satisfaisant pas des réponses pro domo du préfet. Dois-je conclure que les modalités de gestion des patients par un hôpital public quant à la communication des résultats, quant aux rencontres avec le praticien de santé, quant à la gestion des rendez-vous et en présence d'un abus de pouvoir évident d'un chef de service sont moins importantes que des problèmes rencontrés lors de demandes de naturalisations ? A l’évidence.
Stephen G Hürner